Les trois ducats
Cela se passait il y a
bien longtemps, aux portes de la bonne ville de Toulouse en Occitanie. Un soleil
radieux illuminait le ciel, faisant chanter les briques de la ville rose, et
un cortège haut en couleur faisait son entrée par la grande porte;
Le Roi René venant présenter à ses sujets la belle Aude,
sa future épouse.
Le cortège était arrivé sur la Place du Capitole, noire
d'un peuple en liesse, lorsque, levant les yeux, la jeune princesse pousse un
cri ! Au gibet patibulaire trônant dans un coin de la place, le bourreau
s'apprête à passer la corde au cou d'un homme à la pauvre
mine, qulque gueux sans doute qui devait bien un jour en arriver là...
- Oh ! supplie la belle Aude, ne peut-on lui faire grâce un jour comme
celui-ci ?
- Nous ne le pouvons, Princesse, répondent les capitouls. Il a commis
un crime pour lequel il n'y a pas de pardon !
- Mais un tel crime peut-il exister ? N'y a-t-il pas quelque moyen de l'absoudre
que je puisse mettre en oeuvre ?
- Princesse, il est prévu par notre loi qu'on peut le racheter moyennant
une somme de mille ducats !
- Mais comment ce pauvre hère peut-il réunir une telle somme !
plaide la jeune épousée.
Elle se tourne alors vers le cortège et ses suivants. De son escarcelle,
le roi tire 500 ducats. La reine en sort 200. Les seigneurs fouillent dans leur
poches et font tinter les pièces dans l'aumônière: victoire
! 997 ducats !
- Messires, pour 997 ducats, vous allez bien faire grâce ?
- Hélas non Princesse. La loi est la loi... Il manque encore trois ducats...
- Pour trois ducats, vous allez le pendre ! Mais fouillez donc ce pauvre homme,
peut-être les a-t-il sur lui ?
Et dans la poche du condamné, on trouve les trois ducats manquants !
Il est sauvé !
Ainsi au moment ultime, lors du Jugement final, pourrons-nous, pécheurs,
implorer la Vierge Marie. Elle sera notre intermédiaire puissante auprès
de son Flis et de toute la Cour céleste. Mais rien n'y pourra faire si
nous n'avons au fond de notre coeur... trois sous de bonne volonté.